Ou est-ce que le contexte du voyage me facilite la tâche ? Cet état, que j’ai trop connu, m’est apparu insupportable. Refermée sur moi-même, incapable de nommer ce qui ne me convient pas. Prise avec des besoins, des envies, des idées, des inconforts qui restent coincées en moi. À dire, confronter, affronter, affirmer, clarifier dans ma tête, mais pas de vive voix. L’incohérence, l’égocentrisme... je commence à reconnaître les sources de mes réactions intenses. Mais au-delà de la réflexion, c’est la prise de conscience de mes sentiments qui me guident. Aucune envie de rester dans cet état. À des années lumières de ce que les voyages peuvent m’apporter. Formuler une phrase dans ma tête. Une autre. Recommencer. « Are you all right? ». Bien sûr, que je me vois répondre... excusant mon état par la fatigue et la gastro... Reformuler, changer d’idée, sentir les mots coincés dans ma gorge. Me rappeler les fois où j’ai pu laisser passer TANT de temps avant de laisser sortir les mots. C’est si facile de parler quand on sent l’autre à l’écoute. Pas cette fois. Mais je sais comme c’est soulageant une fois que c’est fait. « I think I’m don’t feel comfortable to continue my trip with you ». C’est fait, ouf. J’attends la réaction. Je n’entends rien. Je continue... « des amis m’ont parlé d’une guesthouse pas trop loin, peux-tu m’y laisser? » Je m’organiserai pour la suite. Et voilà. Il est pire que moi finalement, pour parler franchement. C’est tout. Soupire de soulagement.
Puis l’incertitude prend place. Ce sera plus compliqué comme voyage. Plusieurs des endroits que j’ai envie de voir ne sont pas facilement accessible sans voiture. Je n’arrive toujours pas à faire fonctionner mon téléphone ici, et ça semble presqu’un essentiel pour fonctionner. Il n’y a aucun transport en commun dans le petit bled de touristes riches dans lequel je suis actuellement. Les transports me coûteront pas mal plus cher... Pourtant, je me balade, sourire aux lèvres, à ma vitesse, en arrêtant où j’ai envie, en me laissant éblouir par le paysage. Je suis bien. J’ai MON rythme, MON style, MES défis... MON voyage!
À chaque départ, je retrouve cet éternel questionnement... Pourquoi? Pourquoi partir? Pourquoi me retrouver dans des situations pas possibles, insécurisantes, déstabilisantes?
Les réponses arrivent déjà...
Parce que j’arrive à mieux me comprendre, mieux m’écouter, me connecter à moi-même.
Parce que quand je suis sur le bon chemin, je souris en marchant.
Parce que j’apprends tellement en si peu de temps.
Pour les rencontres qui me parlent de leur coups de coeur et me donnent envie de continuer mes découvertes.
Pour les rencontres d’une journée, d’une heure, d’une semaine qui me font découvrir de nouvelles perspectives.
Pour les gens, touchés par ma situation, ou ceux qui me trouvent courageuse, qui m’offrent gracieusement un lift jusqu’à la ville la plus près, m’amènent acheter mon billet de bus, me déposent dans un petit resto familial. Pour cette famille qui garde mon backpack pour la journée, qui me conduit plus tard à la station de bus. Pour la maman, qui me donne des conseils de sécurité dans ce pays pas si sécuritaire.
Pour des journées inusités, à goûter du champagne à 10h le matin et des vins jusqu’à 17h, dans un décor des plus majestueux, en tram et en autobus, avec la charmante compagnie d’un couple belge-italien-éthiopien adorable...
Pour les paysages, les aventures, les découvertes.
Pour les sentiments de liberté, de force, de vulnérabilité.
Pour l’intensité des émotions chaque jours.
Pour la personne que cela fait de moi... Écris-je en devenant émue!