3 mots. 3 raisons d'écrire. 3 mots qui peuvent vivre seuls ou reliés. 3 mots séparés, parce que je ne peux choisir une formulation. Et parce que de cette façon, pas de restrictions, les fenêtres sont grandes ouvertes!

samedi 23 avril 2011

Destination


Destination Pi Mai Lao. En avril, c'était le Nouvel an Lao. Wow, quelle aventure! C'est une fête gigantesque ici. Déjà, les Laotiens ont la bonne (ou mauvaise - selon le point de vue ou le degré de modération) habitude de fêter tout ce qui est possible de fêter. Mais les trois jours du Pi Mai sont le summum des fêtes Laos. Comme lors de chaque célébration Lao, c'est toujours bien arrosé de «Beer Lao» et de Lao lao (whisky de riz). Mais ce qui est différent durant cette fête, c'est l'ambiance dans laquelle se fait cette beuverie! Essayez d'imaginer cela...
La ville entière devient le lieu d'une bataille d'eau monumentale. Pendant trois jours, petits et grands se donnent à coeur joie dans cette guerre mouillée. Fusils à eau, pleines chaudières, seaux de toutes les tailles, tuyaux d'arrosage sont partout. Pour agrémenter le tout, certains se promènent avec des sacs de farine ou du cambouis, histoire de nous faire un beau style propre. Puis certains ajoutent colorant ou peinture à leur eau. Tout ça rend les rues de Luang Prabang très colorées! Partout la musique est à son maximum (comme d'habitude...) et les gens dansent dans la rue, sur les tables, dans les «boîtes de pickup»... partout! Le contraste avec la retenue habituelle des Laosiens est impressionnant. Pour un pays où les planchers de danses sont illégaux dans les bars, et où même la musique était interdite il n'y a pas si longtemps,
ce n'est pas peu dire! Les seuls endroits pour danser sont des espèces de discothèques typiquement laotiennes, avec une musique très redondante et peu originale, et où on ne danse que les danses traditionnelles, elles aussi très redondantes et peu originales: ce sont des danses en lignes ou des danses en couple durant lesquelles on ne se touche pas et on ne bouge que les mains devant nous en faisant quelques pas de face ou de côté. Dans les discothèques pour jeunes, où on peut maintenant entendre de la musique thailandaise et de la pop internationale, on ne voit habituellement que les falangs danser. Cela dit, ces trois jours de Pi Mai représentaient un chaos et un laisser-aller peu habituel!

vendredi 8 avril 2011

Moi. Destination. Sourire.

Moi. Destination méditation. Opération sourire!

10 jours de Vipassana. 10 jours qui viennent de se terminer. 10 jours intenses, très intenses. Je suis sans mot par rapport à cette expérience... Ou non, je ne devrais pas dire sans mot car ils sortent maintenant tous seuls, mais je n’arrive pas à capturer les bons mots, comme si mon expérience dépassait la force des mots. Serais-je encore sous le choc...? Peut-être, il faut prendre le temps de retomber les deux pieds dans le monde, après tant de temps à analyser les sensations les plus subtiles possible...

Vipassana... Une technique de méditation, assurément, mais un mode de vie surtout, un art de vivre. Une pratique quotidienne est nécessaire pour la continuité des apprentissages, acquis et bienfaits que j’ai expérimentés pendant ces 10 jours. Deux heures par jour sont demandées; une le soir, une le matin, chacune suivie de quelques minutes de «metta», la technique de méditation qui permet de partager avec tous l’amour, la compassion, la paix, l’harmonie, le dhamma que l’on cultive en nous. Puis s’endormir le soir en pensant, équanimement (avec objectivité), à nos sensations et leur caractère impermanent, changeant à chaque instant, «annicca». Et faire tout cela en respectant certaines règles essentielles de moralité, «silah» et en faisant preuve d’attention consciente et de sagesse, «simantha». Beau contrat!!

(Ici, j’en entends plusieurs se dire... «Mais qu’est-ce que ce charabia? Ce vocabulaire bouddhiste? Ce n’est qu’une secte de plus, une doctrine, qui te force à suivre des règles particulières....» Et je répondrais que j’ai réagi de la même façon au début... Puis j’ai compris qu’un nouveau vocabulaire était nécessaire pour nommer ce que notre langue ne connait pas. Et j’ai aussi compris que les règles allaient de paire avec un bon sens moral. Il n’est donc pas du tout lieu de suivre aveuglément les commandements d’un guru quelconque.)

Les 10 jours que je viens de vivre m’ont paru être parmi les plus durs de ma vie pendait que je les vivais, mais déjà avec la merveilleuse capacité du cerveau humain à effacer (ou camoufler, cacher, refouler...) ce qui fait mal pour laisser la place aux souvenirs plus agréables, les difficultés s’estompent dans ma mémoire. Puis maintenant, je dois avouer que je me sens plutôt bien, légère et que je me suis débarrassée de certaines négativités, ce qui aide à voir le côté positif !

Au début il faut vraiment se faire violence pour arriver à rester assis à tenter de méditer pendant plus de 10 heures par jour, et ce, dès 4h30 du matin! Surtout qu’au début, on doit dompter son esprit qui saute partout comme un singe dans une cage. Il faut observer sa respiration naturelle, sentir l’air qui passe au niveau des narines! Wow! C’est une activité si captivante que mon esprit arrive à y laisser son attention pour la durée incroyable de deux respirations. Génial! Ça va être beau pendant 10 jours... Je me demande alors vraiment ce que je fais dans ce centre. Et puis, j’entends les chants supposés supporter notre méditation. Je me questionne réellement à savoir si cela n’est pas un coup monté, une farce à grande échelle! Sur l’enregistrement, l’homme a une voix des plus ordinaires et semble avoir choisi des syllabes au hasard dans son répertoire et les mettre sur des notes disparates sans mélodie avec un rythme cassé. Et pour couronner le tout, il ose descendre sa voix si grave, qu’elle n’est alors plus voix, elle n’est que raucité (ça d’ailleurs, ça fait siller mes oreilles d’orthophoniste) et donne à l’ensemble un effet très peu harmonieux! La voix ose alors prendre la parole (en anglais) en prenant bien soin de faire dans le rauque de temps à autre. Puis elle a cette énervante habitude de répéter trois fois le dernier mot de ses phrases. Non mais dans quoi me suis-je embarquée?!

Sous les bons conseils de la voix enregistrée qui nous présente tous les soirs un discours sur la technique de méditation, je décide malgré tout de donner ses chances à la technique et de l’essayer «dans toute sa pureté», comme le dit la voix. Il y a une bonne part d’orgueil qui m’empêche d’abandonner. Et de la curiosité aussi. Plus tard, c’est la détermination qui prend le relais. Surmonter l’épreuve, aller jusqu’au bout, apprendre le plus possible, me rendre le plus loin possible, bénéficier de l’endroit, du support, pour atteindre le stade le plus profond possible. Mais tout cela, ce n’est qu’après les premiers jours passés... Et même, ce n’est qu’à la toute fin. Est aussi venu un moment où je me suis mise à apprécier les chants (qui ne sont pourtant jamais devenus mélodieux) et à trouver à l’homme derrière la voix un bel humour!

Alors, je finis par donner ses chances à la technique et me lance dedans. Je travaille dur, très dur. Toutes sortes d’idées, de pensées, surgissent dans ma tête. Tout cela diminue tranquillement; interdiction de parler avec quiconque ou de se divertir l’esprit avec quoi que ce soit aidants.

Au jour 4, on apprend et pratique la technique de Vipassana. On a maintenant appris à faire taire notre esprit de notre mieux et à porter notre attention sur une toute petite partie du corps, si petite qu’on apprend à bien aiguiser notre attention. Maintenant, ces infimes sensations qu’on a ressenties sur une petite partie de notre corps, on doit s’efforcer de les observer sur tout notre corps. On le «scan» de la tête au pied, et plus tard, des pieds à la tête aussi, partie par partie, et on observe les sensations. C’est là que le travaille s’intensifie. On a deux sortes de sensations; les subtiles et les grossières. Les deux vont et viennent toujours. Elles sont soit agréables soit désagréables, voire très désagréables, et il ne faut que les observer, sans y réagir. C’est cela Vipassana. Observer les sensations sans réagir, observer objectivement, comme un scientifique le ferait pour observer un phénomène quelconque. Et c’est de cette observation objective qu’on peut tirer les conclusions, qu’on peut expérimenter la vérité, la loi de la nature. On nous avertit bien de ne pas croire aveuglément ce que l’on nous dit, mais de ne le croire que lorsqu’on l’aura vécu nous-mêmes. Donc Vipassana, c’est d’observer objectivement, avec «équanimité» nos sensations, sans y réagir, et en comprenant la loi de la nature, soit que tout change, tout est impermanent; c’est «annicca». Et c’est tout un défi! Et l’expérience est d’autant plus éprouvante qu’à partir du jour 6, on doit, trois fois par jour, exercer une heure de méditation sans bouger. Il faut être immobile: interdiction d’ouvrir les yeux, les bras, les jambes, la bouche. Je vous laisse imaginer les douleurs ressenties... C’est atroce! Et pourtant il faut continuer à être équanime face à nos sensations... observer, observer, ne pas réagir, tout change, ça va, ça vient, ça va passer, comme tout le reste... Par moment, ça frôle la torture! Mais il a les discours le soir qui nous explique théoriquement ce que l’on travaille ainsi, et on a l’expérience, le vécu, les résultats qui concordent avec les discours et qui nous convainquent de poursuivre.

On apprend donc qu’en cessant de réagir aux sensations, on cesse de créer de nouveaux «sankaras» (réactions) d’aversion et de désir. Ces deux «sankaras» sont les causes de toutes souffrances, voilà pourquoi nous devons nous en libérer. Mais, dans notre vie, nous les accumulons et les multiplions chaque fois que nous réagissons aux sensations d’aversion et de désir qui nous envahissent et les laissons ainsi se gonfler et prendre beaucoup de place. La technique de méditation de Vipassana vise à nous apprendre à cesser de créer de nouveaux «sankaras» d’aversion et de désir et à épuiser les stocks que nous avons accumulés non seulement depuis notre naissance, mais depuis plusieurs vies antérieures. (Ça c’est un autre point qui correspond à nos croyances, personnelles ou collectives, ou non. Et comme le reste, on peut mettre de côté si cela ne nous convient pas d’y croire et de ne le croire que si l’on expérimente nous-même l’existence de la réincarnation). Intellectuellement, les concepts sont souvent faciles à comprendre, et il est important de les comprendre ainsi pour pouvoir bien travailler et arriver à les expérimenter. Toutefois, les comprendre intellectuellement ne veut pas dire y croire ou y adhérer, il faut attendre de les vivre pour cela. Et pourquoi, donc, le désir et l’aversion sont les causes de nos souffrances? Et bien l’aversion, engendre beaucoup de négativité. Et, comme on l’entend parfois, la colère engendre la colère. Et bien c’est cela, quelque chose nous fait avoir une sensation désagréable sur le corps, nous y réagissons, par de la colère par exemple, et les sensations se multiplient, les réactions aussi. S’y rattache les anciennes réactions de colère qui se réveillent avec ces sensations similaires, et la colère prend de l’ampleur. Ensuite, la simple fait d’y penser, même si l’objet initial de la colère n’est plus présent, ces sensations et la colère qui vient avec peuvent remonter à la surface. Et cette colère nous rend malheureux. Une personne en colère, est une personne qui souffre. Et en plus, elle se fait souffrir elle-même en nourrissant sa propre colère. Pour le désir, il en va de même, et cela est source de souffrance car qui dit désir, dit attentes et déceptions, insatisfactions. Pendant la méditation, les sensations grossières, comme la douleur par exemple, sont les «sankaras» d’aversion qui font surface et les sensations subtiles, celles de désir. On les observe donc avec objectivité, équanimité, c’est-à-dire sans développer ni aversion, ni désir envers elles.

Et donc, en appliquant la technique, dans toute sa pureté, et en travaillant très, très, dur, on arrive à faire partir des sensations de douleurs tellement intenses et à sentir des sensations subtiles tellement subtiles qu’on expérimente ce que les scientifiques et méditant nous disent: nous ne sommes composés que d’infimes particules qui vibrent, apparaissent et disparaissent... Nous sommes immatériels, nous ne sommes pas solide. Mais nous devrions pourtant être plus que la somme de ces particules, si nous avons des sensations, des réactions? Oui, d’autres éléments entrent en jeu (et là je ne suis pas trop experte en la matière, je n‘ai pas tout assimilé l‘information, n‘ayant pas encore tout «vécu» moi-même), et nous sommes doté de la faculté de penser. Mais en même temps, nous ne sommes rien. Qu’est-ce que «moi», «je», si ce que j’étais il y a 1 an, 1 heure, 1 minutes, 1 seconde n’est plus? Nous pensons que nous sommes la même personne, car nous avons tous créé un «moi» pour nous-mêmes, mais ce «moi» change d’instant en instant et n’est plus le même. Un méditant expérimenté peu sentir son corps vieillir, car il peut être conscient de tous ces changements dans son corps qui lui montrent qu’il n’est plus le même. Néanmoins, pour vivre dans le monde, pour faciliter les choses, on conserve cette terminologie et cette convention du «moi». (Personnellement, je ne suis pas rendue suffisamment loin dans la pratique de la méditation pour être détachée de ce moi, «je suis» toujours!). Tout n’existe que dans le moment présent et comme le présent change constamment, personne ne peut le montrer à personne... Il faut donc le vivre!

J’ai donc senti mon corps se dissoudre, se diviser en infimes particules, pour ne devenir que vibrations. Et en méditante débutante, je me suis attachée à cette sensation agréable... Et elle a disparue, laissant place à d’autres sensations beaucoup plus grossières et moins, beaucoup moins agréables. Je me suis mise à jouer au jeu dangereux des sensations, passant de l’euphorie à la dépression, la négativité, le découragement; ce qui est le pire ennemi du méditant. Les «sankaras» sont remontés, encore et encore. J’ai perdu mon équanimité. Échec. J’ai oublié, le temps d’un instant, que tout change, et j’ai voulu faire durer ce moment de sensations agréables. Je reprends alors. Déterminée à retrouver mon équanimité, je recommence. C’est encore plus difficile et frustrant, mais je travaille très fort et ne referai plus cette erreur. Je n’ai pas pu atteindre ce niveau par après, mais j’ai travaillé des tonnes et des tonnes de «sankaras» d’aversion. Et je travaille ceux du désir; ne pas réagir, ne pas réagir, tout change, tout est impermanent. Je ne retomberai pas dans le même piège. Je suis très consciente de mes sensations, d’une conscience attentive.

Parmi les sensations à observer de façon objective, j’ai eu à faire face à des sensations en particulier que je connais très bien et qui ont représenté tout un défi pour moi. La première étape du «scan» des sensations sur le corps se fait en surface. On observe donc toutes les sensations sur le corps. Puis, lorsqu’on est capable de faire passer un flux libre à travers tout le corps, sans embuche, alors on se met à travailler les sensations à travers le corps, à l'intérieur. Je ne suis toujours à travailler que celle en surface, sauf qu’à un certain moment, des sensations auxquelles je réagis fortement se sont manifestées à l‘intérieur. Les sensations physiques rattachées à l’angoisse, l’anxiété. J’ai eu à y faire face lors d’une période de méditation immobile d’une heure. Je n’avais donc pas le choix. J’ai donc décortiqué ces sensations comme un biologiste disséquerait une plante, un animal. J’ai observé les sensations de serrement, de tensions, de pression. Cela m’a bien pris une heure, à travailler mon objectivité, à comprendre que tout change, à observer et observer, puis, petit à petit, les sensations physiques ont perdu le sens que je leur donne et se sont mis à disparaitre en vaguelettes, en vibrations et je me suis libérée de cette sensation. J’étais bien fière de moi. Et cela m’a aussi aidé à voir les bénéfices réels de la méthode. Car, oui, je suis passée par des périodes de doutes intenses, de questionnements. J’ai eu du mal à comprendre comment cela pourrait prendre une place dans ma vie de tous les jours, car, loin de moi l’idée de vivre une vie de moine. Mais cet épisode, très concret pour moi, m’a permis de dissiper plusieurs doutes. Ma méditation a d’ailleurs été plus efficace par la suite, car lorsqu’on doute, on embrouille notre esprit.

Au fur et à mesure que les jours avancent, je me sens plus légère, je sens que vraiment je suis arrivée à me libérer de certaines aversions et désirs. Mais rien n’égale le sentiment incroyable d’amour que l’on ressent à la dernière journée, lorsqu’on apprend une autre méthode de méditation, qu’on appelle «Metta». Contrairement à ce que l’on travaille depuis le début, les sensations sur notre propre corps, tout tourné vers nous-mêmes, voilà qu’on laisse sortir les vibrations, qu’on les laisse rayonner partout, le plus loin possible. Le but? Partager l’amour, la compassion, la paix, l’harmonie, le dhamma (le chemin pour se libérer des souffrances) que l’on a en nous. La première fois que j’en ai fait l’expérience, j’ai ressenti un amour d’une intensité incroyable. Nous étions près de 80 méditants à le faire en même, dans la même pièce et l’énergie qui s’en dégageait était forte et belle. J’ai ressenti un sentiment d’amour intense, merveilleux. C’était comme d’être amoureuse, mais purement amoureuse, sans désirer «posséder» quelqu’un, sans vouloir être avec l’autre, juste être amoureuse. Et, être amoureuse ainsi, de tous les humains de la terre en même temps. C’est beaucoup d’amour ça! Et cette technique sert à partager cet amour. Je vous laisse imaginer les sourires de tous en sortant de cette pièce. Et, en plus, renforcé par le fait qu’à partir de ce moment là, on peut commencer à parler ensemble, pour la première fois depuis 10 jours.

Maintenant, chacune de mes périodes de méditation à la maison doivent se terminer par quelques minutes de «metta». Je n’arrive pas à ressentir un sentiment aussi fort qu’à ce moment là, mais cela est facilement explicable: je suis seule et ne reçoit donc pas le «metta» des autres, et le niveau de méditation que j’atteins en une heure, chez moi, est loin d’être aussi profond que celui que j’ai pu atteindre des les conditions idéales du centre de méditation.

Actuellement, je suis rentrée chez moi, à Luang Prabang, et je dois poursuivre cette pratique pour conserver et augmenter les bénéfices. C’est beaucoup plus difficile. Ça demande une grande détermination et je n’ai personne autour de moi pour m’encourager à le faire. C’est comme l’entraînement physique, c’est beaucoup plus facile de se motiver quand on est deux! Mais les bénéfices sont assez importants et concrets pour que je mette les efforts nécessaires pour poursuivre. Déjà, la journée de ma sortie, j’ai eu encore cette sensation d’anxiété qui m’a prise. Probablement par la quantité de stimuli qui m’entouraient dans la ville de Chiang Mai, énorme contraste avec le calme du centre. Puis, j’ai vu que j’avais 80 nouveaux messages dans ma boîte courriel, sans compter facebook, et tranquillement, le stress a fait surface, sans vraiment qu’il n’y ait d’agent réellement stressant (en soi, avec beaucoup de message n‘est pas tellement stressant...!)! Puis, j’ai tenté consciemment d’y faire face, de rester équanime, de me rappeler que c’est impermanent. De décortiquer les sensations en différentes parties, tout en continuant de marcher, de manger, de regarder mes courriels. Et, rien n’est magique, le sentiment de stress n’est pas disparu en 30 minutes! Mais, au bout de quelques heures, je m’en étais complètement débarrassée. Tranquillement, il a diminué jusqu’à disparaitre. Et cela s’est fait dans un délai plus court qu’à l’habitude. Avec la pratique, le délai sera encore et encore plus court. Mais déjà, ça, c’est un bénéfice concret et très pertinent pour moi. Quelqu’un d’autre expérimentera quelque chose de totalement différent, comme cet autre méditant qui doit faire face à des sentiments (ou sensations) de haine. Il arrive à s’en débarrasser plus rapidement.

Je sais pertinemment que cela m’aidera dans d’autres contextes. Par exemple, j’ai cette tendance à me sentir très affectée par l’attitude négative des gens envers moi, même si, dans ma tête je sais que cette personne agit ainsi pour telle ou telle raison qui est étrangère à moi. Mais j’ai ce sentiment d’injustice qui monte et m’afflige, «Je ne mérite pas de me faire traiter ainsi». Je suis en train d’apprendre à observer les sensations que ces situations me font vivre et à y réagir objectivement, à ne pas me sentir affligée, choquée, triste ou en colère par rapport à cela, ou alors, de moins en moins longtemps. Et plutôt, à avoir de la compassion pour ces gens qui souffrent de leur propre négativité. Car si on est négatif ou en colère, on se fait nous-mêmes souffrir d’abord d’être dans cet état, et ensuite on en fait souffrir ceux qui nous entourent. À moins que ces derniers décident de ne pas recevoir ce cadeau d’insulte ou de négativité. Néanmoins, c’est ce qui fait du sens pour moi, c’est ce que je vois actuellement comme bénéfice, car c’est ce que j’ai à travailler sur moi-même, et je le savais bien avant de faire de la méditation. Maintenant, j’ai un outil pour y arriver. Et, ne pas réagir à mes sensations ne veut pas dire de ne pas réagir à l’insulte ou la remarque désobligeante. Non, seulement, la façon dont j’y répondrai (même si c’est en criant) sera dénuée d’un sentiment négatif. Je réagirai à la situation de la meilleure façon que ce soit par des gestes, des paroles, des actions (ce qui pour ma part correspond assez rarement à des cris, mais cela est possible), mais en étant libérée de sentiments négatifs. Je cesserai donc de multiplier ces sensations d’aversions qui restent ancrées quelque part en moi...

Tout au long de mes apprentissages et expériences, j’ai pu faire beaucoup de lien avec les connaissances scientifiques, médicales, philosophiques et psychologiques que j’ai. Plusieurs avenues sont actuellement sous la loupe de chercheurs pour étudier les bénéfices d’une telle méthode de méditation sur les criminels (meurtriers, violents, déviants sexuels, ...), les maladies psychosomatiques, la dépression, etc. Les bénéfices peuvent donc être multiples. En fait, tout cela vise à améliorer la qualité de vie des gens; des méditants et de leur entourage.

Alors maintenant, j’en suis à m’ajuster pour pouvoir pratiquer quotidiennement la méditation tout en conservant ma vie sociale, professionnelle, personnelle bien active. On ne peut pas méditer si on a pris de l’alcool, il est donc hors de question de méditer en rentrant le soir, après avoir pris, même un verre, avec des amis. Et, je ne me sens pas prête à mettre complètement de côté ce plaisir, ce geste social. Puis, il y a la question d’être végétarien. Pour respecter «silah», il faut suivre le précepte de ne pas tuer d’être vivant (ou de contribuer à), il va donc de soi de devenir végétarien. Mais je ne suis pas prête à cela non plus. Je n’ai pas eu d’expérience me permettant de voir que la réincarnation a réellement lieu et qu’elle se fait avec les animaux et les insectes. Par ailleurs, je ne sens actuellement pas la différence de mon alimentation sur ma méditation (sauf si j’ai très faim ou beaucoup trop mangé). Je suis donc prête oui à faire certains sacrifices pour poursuivre la pratique de la méditation, à penser à mes sensations régulièrement, à changer ma perceptions de certaines choses, à réagir avec équanimité le plus souvent possible et tout cela en accord avec ce que j‘ai expérimenté. Mais, je ne suis pas prête à cesser l’alcool, ni à cesser de manger de la viande, car je n’ai pas, moi-même, expérimenté que cela avait un impact sur ma pratique ou ses bénéfices. Puis, il s’agit d’avoir une bonne auto-discipline et un certain sens de l’organisation pour que les périodes de méditations ne nuisent pas à ma vie sociale et vice versa. Donc, il ne s’agit pas de devenir une illuminée qui ne vit que pour les sensations intenses vécues pendant la méditation, mais simplement d’utiliser la méditation comme outil pour améliorer ma vie au quotidien, éviter de m’infliger moi-même des souffrances, par la colère ou la déception par exemple, d’améliorer mes relations avec autrui, d’augmenter mon efficacité au travail en même temps que mes capacités d’attentions, etc. Et tout cela sera un travail de longue haleine! On nous dit que si pendant la première année on arrive à tenir bon et méditer tous les jours comme prescrit, alors ce sera bien intégré pour toujours... Mais la détermination doit être grande pendant cette période! Je serai fière de moi si j’y arrive!

Pour les curieux, les intéressés; www.dhamma.org